Rapport d’activités 2010

Extrait du bulletin de la SAAST 2010

ARCHÉOLOGIE DE TERRAIN

Paléolithique

1 - burin ; 2 - lame retouchée ; 3 et 4 - grattoirs à front étroit ; 5 - bec
1 – burin ; 2 – lame retouchée ; 3 et 4 – grattoirs à front étroit ; 5 – bec

Le site d’Uchizy a fait l’objet d’un nouveau ramassage systématique appuyé sur un carroyage de la parcelle facilitant la localisation précise des pièces prélevées. En raison de conditions de visibilité médiocres, la récolte n’a donné que 100 silex. Le lot rassemblé compte néanmoins des éléments caractéristiques du Paléolithique supérieur avec cette fois des outils très faiblement patinés qui pourraient provenir d’une couche en place sous les labours.

1 et 2 - lames appointies ; 3 et 4 - burins ; 5 à 7 - lamelles à dos ; 8 - lamelle appointie ; 9 à 11 - lames retouchées
1 et 2 – lames appointies ; 3 et 4 – burins ; 5 à 7 – lamelles à dos ;
8 – lamelle appointie ; 9 à 11 – lames retouchées

Sur la station gravettienne de Senozan, une surface de 3 000 m² couvrant la seule zone de forte densité localisée en 2009 a livré cette année 423 silex paléolithiques dont 136 lames ou lamelles brutes ou retouchées. Les outils dominés par les lames retouchées comptent également des lames appointies, des burins et des lamelles à dos mais pratiquement pas de grattoirs. Cet assemblage trahit une spécialisation du site qui le démarque nettement des habitats. On pourrait l’interpréter comme un poste de chasse placé sur une voie de migration du gibier, la vallée de la Mouge en l’occurrence, reliant la Saône aux collines du Mâconnais.

 

Mésolithique

Dans la prairie de Saint-Albain, les tranchées du gazoduc ont recoupé des niveaux illustrant plusieurs périodes différentes. L’un d’eux, marqué localement par des accumulations de charbons de bois, a donné quelques silex attribuables au Mésolithique récent dont une lamelle très régulière et un trapèze rectangle.

Néolithique

1 et 2 - armatures tranchantes chasséennes ; 3 - armature perçante losangique ; 4 - lamelle brute en silex blond ; 5 - grattoir ; 6 - perçoir bâtonnet ; 7 - extrémité effilée de perçoir ; 8 et 9 - éclats de quartz
1 et 2 – armatures tranchantes chasséennes ; 3 – armature perçante losangique ;
4 – lamelle brute en silex blond ; 5 – grattoir ; 6 – perçoir bâtonnet ;
7 – extrémité effilée de perçoir ; 8 et 9 – éclats de quartz

Trois passages sur la station de Champ-Villars ont livré une abondante moisson d’objets néolithiques parmi lesquels se distinguent 5 armatures tranchantes, 9 fragments de quartz et 34 éléments de roche verte. Ces derniers illustrent tous les stades de fabrication de haches polies sur le site même depuis le bloc brut jusqu’à l’outil fini. On note également une armature perçante tirant sur le losange qui serait, parmi toutes les pointes de flèches issues de la station, la première de ce type à se rapporter au Chasséen.

En dépit d’une visibilité réduite, la prospection des coupes affouagistes 2009 et 2010 sur la commune de Vers a permis de montrer que cette zone sableuse recelant des silex naturels a été visitée au Paléolithique d’abord mais surtout au Néolithique ensuite, à en juger par les nombreux éléments intentionnellement débités découverts en différents points. La rareté des gros blocs ou des nucléus pourrait accréditer le fait relaté par les anciens du village rapportant que les rognons de silex ont été récupérés pour être vendus comme ballast lors de la construction du PLM.

Armature de flèche à pédoncule et ailerons
Armature de flèche à pédoncule et ailerons. Longueur maximale : 24 mm

Cette année, à Nanton, les vestiges néolithiques ont été récoltés plus nombreux que lors des ramassages précédents. Une pointe de flèche tendant vers le type à ailerons carrés plaiderait pour une attribution de l’industrie à l’extrême fin du Néolithique. Cette concentration peut désormais être considérée comme un véritable site préhistorique.

Gallo-romain

Quatre nouveaux sites sont venus enrichir la carte déjà très fournie de l’occupation gallo-romaine en Tournugeois. Si au Villars et à Jugy, les vestiges recueillis ne trahissent l’emplacement que de constructions très modestes, les travaux de lotissement conduits à Etrigny ont mis au jour des structures beaucoup plus importantes confirmant l’occupation des lieux déduites en 2009 des structures repérées dans le bassin de rétention.

site gallo-romain (Etrigny)
Vue du radier de fondation. A l’est (à droite sur la photo), les vestiges ont été détruits par les cultures.

A la fin du printemps, les travaux de terrassement d’un grand garage-atelier ont recoupé cinq autres structures. Le radier de fondation de plusieurs murs affleurant le décapage du terrain a été nettoyé. Un fossé qui apparaissait en coupe et en plan a été fouillé sur 4 m de longueur. Il a livré de très nombreux tessons de poterie dont une grosse proportion de céramiques fines du début du IIe siècle, de la faune (suidé, équidé, bovidé, ovicapriné, volaille), une fibule en bronze et quelques clous en fer. Quelques mètres plus à l’ouest, un épais niveau de scories de fer signale la présence proche d’un bas-fourneau antique. Ce niveau scelle une couche dense en vestiges qui elle-même comble une légère structure en creux de nature indéterminée. Un sondage réalisé dans ce secteur menacé a confirmé la présence d’une zone artisanale largement consacrée aux activités métallurgiques (bronze, fer et peut-être plomb). La fouille démontre par ailleurs une occupation romaine antérieure aux murs. Les travaux liés à ce lotissement devraient se poursuivre durant 2011 et 2012 avec l’implantation de deux nouvelles maisons. Ils ne manqueront certainement pas d’affecter ce site archéologique.

Jupiter en bronze
Jupiter en bronze tenant un oiseau évoquant plutôt une oie qu’un aigle. Hauteur : 7,5 cm

Dans son Chalonnais gallo-romain, Louis-Armand Caillat mentionne un Jupiter en bronze recueilli fortuitement dans le bourg de Mancey en 1930. Nous avons pu retrouver la trace de cette statuette et enregistrer le lieu précis et les circonstances de la découverte. La terre des massifs de fleurs proches du puits dont le creusement a livré l’objet recèle des fragments de tuiles à rebords et quelques tessons romains. Une tête féminine en calcaire a également été exhumée dans ce secteur mais elle reste introuvable à ce jour. Il est possible que la villa dont on soupçonne l’existence puisse correspondre à celle qui a donné son nom au village de Mancey (Manciacum).

 

Géoarchéologie

Les travaux d’enfouissement du gazoduc menés par GRTgaz ont généré d’importantes coupes de terrain sur un parcours de 85 km entre Etrez et Génelard (Artère du Mâconnais). En Saône-et-Loire, seuls quelques secteurs traversés ont fait l’objet d’une opération de diagnostic archéologique alors qu’en Rhône-Alpes, le Service Régional de l’Archéologie a opté pour une surveillance quasi continue des travaux par deux archéologues de l’Inrap. Même si cette conduite de gaz naturel a été posée en dehors de notre secteur d’investigation, le caractère exceptionnel de ce chantier nous a mobilisés à plusieurs reprises lors du franchissement de la vallée de la Saône, entre mai et juillet 2010, et en particulier au niveau du passage présumé de la Via Agrippa. C’est ce point particulier qui a motivé nos premières interventions car nous voulions d’une part localiser le tracé de cette voie au nord de Saint-Albain mais aussi observer cette structure en coupe, chose que nous n’avions encore jamais pu réaliser en Tournugeois. Si cet objectif n’a pas été atteint, la RN6 se superposant peut-être à la voie romaine dans cette zone précise, de multiples observations concernant le remplissage de la vallée ont été enregistrées.

Fleurville, Les Chaintres

séquence stratigraphique sur plus de 2,50 m de haut (Fleurville)
séquence stratigraphique sur plus de 2,50 m de haut
pointe de flèche en silex à bryozoaires
pointe de flèche en silex à bryozoaires

Le passage du gazoduc sous la RN6 a permis d’étudier une séquence stratigraphique sur plus de 2,50 m de haut, à l’interface entre le cône de déjection du ruisseau de Poiseuil et la plaine alluviale holocène de la Saône.
Huit unités pédosédimentaires ont été distinguées dont une, à la base, composée par une argile noire à structure vertique qui a livré une armature de flèche tranchante. Cette unité repère matérialise manifestement le fond d’une large dépression chenalisante.

Fleurville, en Fourgeot

Vue d'ensemble du chantier du gazoduc à Fleurville
Vue d’ensemble du chantier

Plus à l’ouest, la tranchée a recoupé un paléochenal large d’environ 10 m et situé dans l’axe d’un fond de vallon peu encaissé, en direction du sud-sud-est. Sa base est située à 2,40 m sous la surface du sol actuel. La partie inférieure de son comblement livre du mobilier antique ainsi que des dalles calcaires qui peuvent correspondre aux restes d’un aménagement de berge. La partie supérieure du remplissage est constituée par un limon jaune massif sans éléments grossiers ni mobilier, caractéristique du sommet des séquences alluviales de la plaine de la Saône.

 

Saint-Albain, Sur Vesvre

L’examen de la tranchée sur une longueur d’environ 500 m, située ici le long d’un axe parallèle à la Saône, à moins de 250 m de la rive droite actuelle, a occasionné le repérage d’un paléochenal et de nombreuses petites dépressions, parfois riches en fragments de sol brûlé et charbons de bois. Dans certains secteurs, la séquence alluviale est affectée par des figures de déformation en festons, d’origine périglaciaire possible. Elle est composée de 7 unités pédosédimentaires dont deux riches en matière organique. Une concentration de vestiges mésolithiques a été repérée, située à 1 m sous le sol actuel, tandis qu’un fond de céramique antique a été découvert à 60 cm de profondeur.

L’ensemble de ces données stratigraphiques en cours de traitement serviront à alimenter les réflexions sur l’évolution des paysages fluviaux dans la vallée de la Saône depuis la dernière période glaciaire.

ANIMATIONS

Nous recentrons dorénavant nos animations sur Tournus en accueillant des scolaires dans la salle pédagogique du musée Greuze tout en développant parallèlement des actions visant un public plus large. Murielle Bonin qui avait été réembauchée à partir du 1er septembre 2009 a terminé son contrat fin février 2010.

Animations scolaires

Au cours de l’année 2010, nous avons encadré 22 classes à Tournus : 8 au musée Greuze, 7 au Palais de Justice, 6 à l’abbaye et 1 sur le parcours cadoles. Nous sommes allés à Crèches-sur-Saône pour faire profiter deux CE2 de nos ateliers taille du silex et à Mercurey pour une animation sur les voûtes.

Animations grand public

Le 26 février, nous avons présenté le bilan d’une année de prospection-inventaire à l’auditorium du musée Greuze.

Du 5 au 12 juin, nous avons accompagné l’exposition organisée par l’association Gaïa au Palais de Justice de Tournus en présentant des objets illustrant la pierre au service de l’homme et en animant pendant trois jours des ateliers sur le même thème.

Les 23 et 24 juin, Mathieu Rué et Jean Duriaud ont encadré un stage culturel IUFM à Brancion et Tournus dont l’objectif était de montrer comment l’on pouvait tirer parti des ressources archéologiques d’une région.

Le 31 juillet et les 1er et 2 août, nous avons animé un stand sur la préhistoire à la 50e foire artisanale d’Azé qui avait pour thème l’homme de Cro-Magnon.

Nous avons par ailleurs participé à la réalisation de l’exposition « Entrez en matières » qui s’est tenue à l’Ecomusée du Creusot-Montceau pendant 4 mois en fournissant un échantillonnage de silex naturels représentatifs des altérites tertiaires situées entre Loire et Saône.

Construction d’une voûte en pierre - Journées du Patrimoine 2009
Construction d’une voûte en pierre à l’occasion des Journées du Patrimoine

Les 19 et 20 septembre, de très nombreux visiteurs ont tenté de construire des arcs et des voûtes en participant à nos ateliers installés dans le cloître de l’abbaye à l’occasion des Journées du Patrimoine.

Du 1er janvier au 31 décembre 2010, notre site internet a reçu près de 11 000 visiteurs.

COMMUNICATIONS ET PUBLICATIONS

Jean DURIAUD a présenté une communication à la journée archéologique du CDRA71 à Cuisery le dimanche 10 octobre pour évoquer les découvertes majeures de la campagne 2010 en Tournugeois.

Articles

  • DURIAUD J., COMPAGNON G., RUÉ M., 2010 – Activités du GRAT 2009, Bulletin de la SAAST, tome CVIII, p. 25-34.
  • DURIAUD J., 2010 – Le GRAT in : Les Itinéraires, Saône-et-Loire, éditions Projection, p. 433-435.

Rapport d’opération

  • DURIAUD J., COMPAGNON G., RUÉ M., 2010 – Archéologie en Tournugeois, rapport de prospection-inventaire 2009, SRA Bourgogne, GRAT, 157 p.

ACCUEIL D’ÉTUDIANTS

Dans le cadre d’un master 1, Valérie MORIN a étudié les ossements humains récoltés dans la sépulture fouillée à Cruzille en 2005. Cette structure se démarque des autres tombes barbares découvertes dans la région par ses dimensions inhabituelles et aussi par le fait qu’elle abritait un individu au crâne artificiellement déformé. Le mémoire a été soutenu le 23 septembre 2010 à l’Université Claude Bernard de Lyon. Il fera vraisemblablement l’objet d’une publication.

 

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