Colloque millĂ©naire de l’abbatiale

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1019-2019…

plan de l'abbaye pour les scolaires
L’abbaye Saint-Philibert de Tournus est sans doute l’ensemble abbatial d’époque romane le plus complet visible en France

1019 est la date que nous indique le moine tournusien Falcon pour la consĂ©cration de l’abbatiale Saint-Philibert. Sont alors en cours les travaux de ce qui reste aujourd’hui le principal monument du premier Ăąge roman en Bourgogne.

Mille ans plus tard, on montrera comment l’abbaye Saint-Philibert participait alors tout Ă  la fois d’une recomposition politique au temps des premiers CapĂ©tiens, procĂ©dait d’un positionnement monastique tout Ă  fait original et s’inscrivait dans une inventivitĂ© architecturale dont elle est toujours l’un des plus beaux tĂ©moins.

Les 27 et 28 septembre 2019

Vingt-cinq ans aprĂšs le colloque organisĂ© en 1994 par le CIER, 2019 est l’occasion de croiser Ă  nouveau plusieurs Ă©clairages sur ce dĂ©but du XIe siĂšcle, Ă  Tournus comme en Bourgogne. Cette dĂ©marche est rĂ©sumĂ©e dans l’intitulĂ© des « Rencontres du MillĂ©naire Â» coorganisĂ©es les 27 et 28 septembre 2019 par la SociĂ©tĂ© des Amis des Arts et des Sciences de Tournus (SAAST) et le Centre International d’Etudes Romanes (C.I.E.R) : « Autour de la Chronique de Falcon : recomposition politique – diversitĂ© monastique – inventivitĂ© architecturale dans la Bourgogne du dĂ©but du XIe siĂšcle Â».

1. Recomposition politique

Aux alentours de l’an mil, le fĂ©odalisme achĂšve la fragmentation politique du territoire. Certains « regni Â» tentent encore de crĂ©er des puissances rĂ©gionales (Otte-Guillaume) ou de les maintenir (royaume de Bourgogne). La guerre franco-bourguignonne (1002-1016) ramĂšne le roi capĂ©tien Robert le Pieux dans le duchĂ©, et son premier alliĂ©, Hugues de Chalon, conclut en 1019 une alliance avec Tournus.

2. Diversité monastique

Au dĂ©but du XIe siĂšcle, Cluny est toute puissante dans la rĂ©gion et bien au-delĂ , mais Tournus, plus ancienne et, entre 810 et 830, chef de file de la rĂ©forme de BenoĂźt d’Aniane, n’a jamais Ă©tĂ© concernĂ©e par la rĂ©forme clunisienne. Les « Rencontres » Ă©taient donc l’occasion de faire pour la premiĂšre fois le point sur ce qui diffĂ©rencie Tournus de Cluny, tant en ce qui concerne la rĂšgle, les orientations gĂ©o-politiques  (entre Empire, royaume de Bourgogne et royaume de France), et la tutelle de l’évĂȘque.

3. Inventivité architecturale

Cette seconde dĂ©cennie du XIe siĂšcle semble ĂȘtre marquĂ©e par la rencontre particuliĂšrement fĂ©conde de plusieurs courants architecturaux qui, en Lombardie, en Catalogne, en Bourgogne du sud, donnent naissance Ă  ce qu’on appelle dĂ©sormais le « premier Ăąge roman Â», Tournus en est l’un des Ă©difices les plus reprĂ©sentatifs, avec des Ă©lĂ©ments pleinement originaux. 2019 est l’occasion de confronter les Ă©tudes et de nouvelles hypothĂšses, ainsi que de faire le point des dĂ©couvertes archĂ©ologiques rĂ©centes. La nĂ©cropole mĂ©rovingienne attestĂ©e dans le site abbatial par de rĂ©cents sondages semble indiquer l’objectif de prochaines fouilles : exhumer les traces de l’oratoire Saint-ValĂ©rien et comprendre ses imbrications avec les constructions philibertines successives.

Programme des « Rencontres Â»

  • Elles ont lieu les 27 et 28 septembre 2019 et se sont tenues au « cellier des moines » de l’abbaye Saint-Philibert de Tournus.
  • Les 17 intervenants ont rĂ©digĂ© un rĂ©sumĂ© de leur communication que vous trouverez ci-aprĂšs en attendant la parution des Actes dont la publication, trĂšs attendue, ne pourra pas intervenir avant le courant de l’annĂ©e 2020.
1re journée :
vendredi 27 septembre 2019,
Cellier des Moines
  • 9 h 30 : Accueil – Discours inauguraux
1019 en Bourgogne
  • 10 h : Falcon, Ă©crivain de Tournus

François BOUGARD, professeur d’histoire du Moyen Age à Paris-Nanterre, directeur de l’IRHT (Institut de Recherche et de l’Histoire des Textes)

Document historique, dont les rĂ©cits documentent le passĂ© d’une abbaye, la Chronique de Tournus est aussi un document littĂ©raire, oĂč se rĂ©vĂšlent les intentions, la culture et la personnalitĂ© d’un Ă©crivain. Tout au long de l’ouvrage, mais plus spĂ©cialement dans sa lettre de dĂ©dicace, la charniĂšre entre ses deux grandes parties et ses sections finales, Falcon laisse entrevoir la diffĂ©rence entre deux projets littĂ©raires, celui de son abbĂ© Pierre et le sien, ainsi qu’un certain talent pour les ramener Ă  l’unitĂ© dans une vaste geste monastique interrogeant le sens mystĂ©rieux des Ă©vĂ©nements.

Dominique POIREL, directeur de recherche Ă  l’IRHT, archiviste palĂ©ographe, docteur en histoire

Dans quel but le texte traditionnellement prĂ©sentĂ© comme la « Chronique de Falcon Â» a-t-il Ă©tĂ© composĂ© ? L’analyse de la lettre de dĂ©dicace de l’auteur Ă  son abbĂ©, Pierre Ier, puis d’autres passages oĂč Falcon exprime ses intentions, jusqu’Ă  la notice consacrĂ©e Ă  Pierre lui-mĂȘme, permet de discerner entre les deux personnages une tension paisible mais fĂ©conde sur la nature et le sens du document. L’abbĂ©, qui apparaĂźt dans le texte comme un homme d’action et un administrateur, soucieux avant tout d’assurer le rayonnement temporel de son monastĂšre, demandait la mise en ordre des actes Ă©crits sur lesquels se fondent le prestige et les droits de l’abbaye. L’Ă©crivain, qui nourrit des ambitions littĂ©raires et intellectuelles et fait preuve d’une piĂ©tĂ© rĂ©elle, modernement Ă©vangĂ©lique, ajoute au projet une dimension supplĂ©mentaire : il souhaite donner un sens providentiel Ă  l’histoire de son abbaye, montrer que le dĂ©sordre apparent des Ă©vĂ©nements et la discontinuitĂ© des Ă©poques ou de lieux s’unit dans un « unique ordre de raison Â». Cet ordre est celui de la saintetĂ©, dont l’abbaye de Tournus thĂ©saurise ces traces concrĂštes et agissantes que sont les reliques, notamment celles des saints ValĂ©rien et Philibert.

  •  10 h 45 : Le duchĂ© de Bourgogne au dĂ©but du XIe siĂšcle

Jean-Luc CHASSEL, maßtre de conférences en histoire du Moyen Age à Paris-Nanterre

La communication tentera de synthĂ©tiser la situation politique du duchĂ© de Bourgogne au cours des quelques dĂ©cennies qui entourent la dĂ©dicace de l’abbatiale de Tournus en 1019. Elle insistera sur les conflits qui ont agitĂ© cette rĂ©gion pendant la rĂ©union du pouvoir ducal Ă  la couronne entre 1002 et 1031. Ces conflits ont opposĂ©, d’une part, le roi Robert II, soutenu par l’évĂȘque Hugues d’Auxerre, Ă©galement comte de Chalon, et, d’autre part, les comtes de MĂącon et de Besançon, Otte-Guillaume et ses fils, suivis d’un grand nombre de puissants laĂŻcs et ecclĂ©siastiques. Les troubles engendrĂ©s ont finalement renforcĂ© la puissance spirituelle et temporelle des grandes abbayes bourguignonnes. Mais leur principale consĂ©quence a Ă©tĂ© d’accĂ©lĂ©rer la fĂ©odalisation de la sociĂ©tĂ© et la montĂ©e en puissance de l’aristocratie seigneuriale, maĂźtresse des principaux chĂąteaux.

  • 11 h 15 : Les relations entre les trois Bourgognes

François DEMOTZ, docteur en histoire

Au Xe siĂšcle, les Bourgognes, duchĂ©, comtĂ© et royaume s’affirment comme entitĂ©s distinctes mais sans conflit majeur et sans que disparaisse la grande porositĂ© entre elles. Le dĂ©but du siĂšcle suivant est au contraire une pĂ©riode riche en affrontements des deux cĂŽtĂ©s de la SaĂŽne, avec une intervention progressive de tous les souverains. Le propos est de revenir sur la chronologie de ces Ă©vĂšnements – souvent bien connus, parfois mal interprĂ©tĂ©s – et de les relire au prisme des relations entre les diffĂ©rents espaces politiques qui voisinent sur la SaĂŽne et constituent la zone des Burgundiones. Le calendrier dĂ©gagĂ© met en Ă©vidence une premiĂšre phase essentiellement bourguignonne suivie d’une internationalisation des conflits. Si le rĂ©sultat immĂ©diat est de rĂ©concilier les Bourgognes, comme l’illustre le concile de Verdun-sur-le-Doubs, le dĂ©but du XIe siĂšcle dĂ©bouche finalement sur une partition plus rigide, une individualisation de plus en plus marquĂ©e des espaces bourguignons.

  • 11 h 45 : Questions
Tournus et la Bourgogne
  • 14 h 30 : Retour sur la famille et les alliances d’Hugues de Chalon

Christian SETTIPANI, docteur en histoire

L’évĂȘque Hugues de Chalon, qui patronna la reconstruction de l’abbaye de Tournus en 1019, est un personnage important et bien connu de l’histoire de la Bourgogne au dĂ©but du rĂšgne capĂ©tien. Mais ses origines familiales continuent de receler des zones d’ombres. Le propos de cette communication est de revenir sur ces incertitudes et aussi d’élargir le champ de l’enquĂȘte en faisant part de quelques nouveautĂ©s sur les familles comtales de Bourgogne autour de l’an Mil.

  • 15 h : Le chemin vers Tournus : la mĂ©moire des pĂ©rĂ©grinations des moines de Saint-Philibert et le rĂ©seau monastique au XIe siĂšcle

Isabelle CARTRON, professeur d’histoire et d’archĂ©ologie mĂ©diĂ©vale Ă  Bordeaux-Montaigne, Institut Ausonius UMR 5607

L’exode des moines de Saint-Philibert au IXe siĂšcle entre Noirmoutier et Tournus est un Ă©pisode fondamental de leur histoire d’autant plus que le rĂ©seau monastique du XIe siĂšcle a fossilisĂ© ce parcours, les lieux successifs Ă©tant intĂ©grĂ©s dans la congrĂ©gation. Si nous disposons de sources contemporaines pour connaĂźtre les modalitĂ©s de ces dĂ©placements, on sait moins que deux siĂšcles plus tard, deux auteurs vont Ă  nouveau se pencher sur ce passĂ© et transmettre une nouvelle vision des pĂ©rĂ©grinations. En effet, les rĂ©cits de Falcon et de l’auteur anonyme de la « translation de saint ValĂ©rien Â» prĂ©sentent dans un mĂȘme rĂ©cit chronologique, l’histoire des saints et de leurs reliques. Les rĂ©cits enrichissent l’histoire du monastĂšre pour servir son prestige, recomposer sa mĂ©moire et lui donner une nouvelle identitĂ©. Il s’agit aussi de se rĂ©approprier les lieux et de recomposer une nouvelle gĂ©ographie monastique Ă  un moment oĂč la communautĂ© acquiert une vraie stabilitĂ©.

  • 15 h 30 : Saint-Philibert de Tournus dans le paysage monastique bourguignon (XIe-XIIe siĂšcles)

Noelle DEFLOU-LECA, maĂźtre de confĂ©rences en histoire du Moyen Age Ă  l’UniversitĂ© de Grenoble Alpes

Figure majeure du paysage monastique de Bourgogne, Saint-Philibert de Tournus occupe une place spĂ©cifique dans le maillage rĂ©gulier et dans les relations qu’il entretient avec l’aristocratie et les communautĂ©s environnantes. L’objectif de cette communication sera de mesurer l’insertion de cette abbaye dans les rĂ©seaux monastiques bourguignons et de voir en quoi l’Ă©tablissement suit, ou non, une trajectoire comparable Ă  celles des grandes abbayes contemporaines qui occupent l’espace bourguignon entre les temps carolingiens et la fin du XIe siĂšcle.

  • 16 h : Questions – Pause
     
  • 16 h 30 : La circulation monĂ©taire en Bourgogne autour de l’an mil

Vincent BORREL, doctorant à l’ENS

Alors que la premiĂšre partie du Xe siĂšcle a Ă©tĂ© marquĂ©e par de trĂšs faibles Ă©missions, les annĂ©es 960-970 voient le redĂ©marrage des frappes monĂ©taires au travers de l’émission de deniers et oboles d’argent. C’est notamment le cas en Bourgogne mĂ©ridionale oĂč les ateliers de Chalon, de MĂącon, et outre SaĂŽne de Lons et de Salins sont actifs. Les officines d’Autun et de Tournus semblent, quant Ă  elles, connaĂźtre une activitĂ© nettement plus rĂ©duite. Cependant, les trouvailles montrent que la circulation monĂ©taire courante est loin d’ĂȘtre composĂ©e de ces seules espĂšces.

  • 17 h : La fouille de la motte castrale de Loisy

Daniel BARTHELEMY, archĂ©ologue INRAP, prĂ©sident du Groupe archĂ©ologique de MĂącon ; Jacqueline ARGANT, docteur en palynologie et Nicolas MEUNIER, archĂ©ologue-prospecteur dĂ©clarĂ© au SRA

La motte de Loisy a fait l’objet d’une fouille menĂ©e de 1966 Ă  1975 par le Groupement ArchĂ©ologique du MĂąconnais, recherches dirigĂ©es par G. Berthoud et G. Hurou. Ce site est mentionnĂ© dans une charte du cartulaire de Cluny datĂ©e de 1015. Bien que rĂ©alisĂ©es sur un site en partie Ă©rodĂ© par la Seille, les fouilles ont confirmĂ© les donnĂ©es historiques en rĂ©vĂ©lant un espace occupĂ© par des Ă©lites de la sociĂ©tĂ© de la fin du Xe s. et du dĂ©but du XIe s.

  • 17 h 30 : Questions
2e journée :
samedi 28 septembre 2019,
Cellier des Moines et Nef de l’abbatiale
Inventivité architecturale
  • 9 h 15 : Les Xe et XIe siĂšcles Ă  Lyon : architecture et sculpture

Jean-François REYNAUD, professeur honoraire d’histoire de l’art et d’archĂ©ologie mĂ©diĂ©vales, UniversitĂ© Lyon II

Les Ă©difices religieux sont nombreux dĂšs le Ve siĂšcle et ils ont Ă©tĂ© rĂ©guliĂšrement reconstruits mais nous manquons de documents d’archives, de fouilles et d’Ă©difices conservĂ©s en place pour apprĂ©cier l’impact du XIe siĂšcle. Pour cette Ă©poque, les Ă©glises les mieux connues sont Saint-Etienne du groupe Ă©piscopal, les anciennes basiliques funĂ©raires devenues collĂ©giales comme Saint-Just ou Saint-IrĂ©nĂ©e, les nouvelles collĂ©giales comme Saint-Paul, les abbatiales de Saint-Martin d’Ainay ou Saint-Martin et Saint-Loup de l’Île-Barbe. Ces Ă©glises sont originales par leur plan, leur Ă©lĂ©vation et leur dĂ©cor.

  • 10 h : Les monastĂšres du Jura au XIe siĂšcle – Etat des recherches archĂ©ologiques sur Saint-Claude, Baume-les-Messieurs et Gigny

Sébastien BULLY, chargé de recherche au CNRS,

Les annĂ©es qui voient la consĂ©cration de l’abbatiale Saint-Philibert sont aussi celles d’une importante activitĂ© constructive « outre SaĂŽne Â» que l’on peut apprĂ©cier plus particuliĂšrement dans les monastĂšres jurassiens de Saint-Oyend de Joux (Saint-Claude), Baume(-les-Messieurs) et Gigny. Les recherches menĂ©es ces deux derniĂšres dĂ©cennies sur ces Ă©tablissements Ă  travers des Ă©tudes d’archĂ©ologie du bĂąti, des fouilles et sondages archĂ©ologiques, comme des prospections gĂ©ophysiques, permettent d’engager une relecture des choix architecturaux et topographiques mis en Ɠuvre, tout en pointant leur diversitĂ© ou certaines analogies.

  • 10 h 45 : De Cluny II Ă  Saint-Philibert de Tournus, la question des premiers chevets romans

Christian SAPIN, directeur de recherche au CNRS

Jean Hubert dans une contribution au CongrĂšs du CIER de 1954, publiĂ©e en 1957 sous le titre « Saint-Philibert de Tournus et Cluny II Â», avait tentĂ© des rapprochements entre le plan des deux chevets tels qu’ils Ă©taient Ă©tablis Ă  l’Ă©poque par les travaux rĂ©cents des historiens de l’art. Depuis, la connaissance de ces sites a Ă©voluĂ© considĂ©rablement. A Cluny, les derniĂšres campagnes de fouilles archĂ©ologiques (2006-2013) sur des parties du site non explorĂ©es par K. J. Conant ont donnĂ© lieu Ă  des dĂ©couvertes inĂ©dites et Ă  d’autres endroits Ă  une relecture des donnĂ©es des annĂ©es 1930-1950. Elles ont mis en Ă©vidence notamment une Ă©volution rapide de l’Ă©laboration du chevet dans la seconde moitiĂ© du Xe siĂšcle. Sur cette base et Ă  partir de travaux rĂ©cents sur d’autres chevets Ă  OrlĂ©ans, Limoges ou Dijon, nous tenterons de comprendre la constitution du chevet de Saint-Philibert.

  • 11 h 30 : Questions
Saint-Philibert de Tournus,
des temps carolingiens au premier Ăąge roman
  • 14 h : A la recherche d’une nef perdue. ArchĂ©ologie de l’abbatiale du Xe siĂšcle (communication dans la nef de l’abbatiale)

Nicolas REVEYRON, professeur d’histoire de l’art et d’archĂ©ologie du Moyen Age, UniversitĂ© Lyon II.

Qu’est-ce que Saint-Philibert de Tournus ? D’abord un objet scientifique Ă©laborĂ© au cours du XIXe-XXe siĂšcle, un empilement de connaissances, d’avis, d’opinions, de jugements esthĂ©tiques qui rĂ©vĂšlent plus sur l’histoire de l’histoire de l’art que sur l’abbatiale et l’organisation du monastĂšre Ă  l’orĂ©e du second millĂ©naire. Ensuite un ensemble de textes beaucoup plus limpides qu’on a bien voulu l’imaginer, Ă  condition d’admettre qu’une source est d’abord un texte. Enfin, un objet archĂ©ologique qui se lit aisĂ©ment, Ă  condition de l’aborder avec un regard neuf, dĂ©barrassĂ© des prĂ©requis, prĂ©supposĂ©s et autres prĂ©alables. Ce qui nous intĂ©resse ici, c’est l’implication de l’imaginaire dans les orientations de la recherche : l’état des maçonneries et les formes architecturales ont jouĂ© un rĂŽle dĂ©terminant dans l’évaluation sensualiste des dates de construction. Pour MĂ©rimĂ©e, en 1835 : « L’absence d’ornement, le caractĂšre de lourdeur et de rudesse de la nef me font croire que ces parties de l’église sont les plus anciennes. Je n’hĂ©site pas Ă  penser qu’elles datent du Xe siĂšcle Â». Stendhal renchĂ©rit en 1838 : « L’intĂ©rieur n’est remarquable que par d’énormes piliers fort bas, et qui ont jusqu’à huit pieds de diamĂštre [
] j’ajouterai que les fenĂȘtres sont petites, Ă©troites et cintrĂ©es par en haut. Il est impossible de rien voir de plus massif, de plus lourd, de plus solide que les parties principales de cette Ă©glise, dont le chƓur a de l’élĂ©gance et rappelle l’architecture du XIIe siĂšcle Â». En 1905, encore, J. Virey a Ă©crit : « DĂšs le seuil du narthex l’impression est saisissante : Ă  quel Ăąge reculĂ©, confinant encore Ă  la barbarie, appartient cette construction lourde et massive oĂč quatre piliers cylindriques, Ă©normes et d’aspect trapu, supportent des voĂ»tes basses sous lesquelles la lumiĂšre pĂ©nĂštre Ă  peine, parcimonieusement distribuĂ©e par des fenĂȘtres rares et Ă©troites ? ». Mais parallĂšlement, une vision rĂ©aliste des maçonneries a vite rĂ©vĂ©lĂ© des Ă©vidences dont on a rarement tenu compte. Ainsi, dĂšs 1835, MĂ©rimĂ©e reconnaissait que « L’incendie qui dĂ©vasta le monastĂšre a dĂ» ĂȘtre impuissant contre ces masses Ă©normes [
] La restauration de Bernier en 1019, se borna probablement Ă  substituer dans la nef des voĂ»tes aux plafonds Â». Aujourd’hui, les changements de paradigmes, le renouvellement des horizons de recherche et le dĂ©veloppement de l’archĂ©ologie permettent de regarder d’un Ɠil neuf cette abbatiale dont la nef est un rare vestige de l’architecture du Xe siĂšcle.

  • 15 h : Le site monastique et l’Ă©glise abbatiale de Tournus au Xe et au dĂ©but du XIe siĂšcle. Chronologie des constructions et Ă©volution des occupations d’aprĂšs les donnĂ©es archĂ©ologiques rĂ©centes.

Benjamin SAINT-JEAN-VITUS, ingénieur chargé de recherches, INRAP

La mise en ordre des observations issues des Ă©tudes d’élĂ©vations, sondages et fouilles stratigraphiques effectuĂ©s par l’auteur Ă  travers tout le site de l’abbaye Saint-Philibert, depuis 30 ans et jusqu’à rĂ©cemment, permet d’esquisser une chronologie gĂ©nĂ©rale de ses constructions et occupations. Lacunes et interrogations restent nombreuses, surtout pour les pĂ©riodes hautes ; mais cette Ă©volution est balisĂ©e par une sĂ©rie de repĂšres de datation, parfois Ă©clairĂ©s par les Ă©tudes archĂ©ologiques d’autres sites souvent proches (Chalon-sur-SaĂŽne, Laives, Brancion
). La mise en relation de certaines observations de terrain restĂ©es pour l’heure discontinues permet aussi de formuler quelques hypothĂšses complĂ©mentaires. À l’occasion de la commĂ©moration de la consĂ©cration de 1019, cette communication cherchera, Ă  partir de ce corpus de donnĂ©es, Ă  faire le point sur ce qu’on peut apprĂ©hender du site et de son Ă©volution, entre le Xe et la premiĂšre moitiĂ© du XIe siĂšcle Ă  peu prĂšs.

  • 16 h : La Bourgogne Ă  l’aube de l’art roman. Styles architecturaux et arts de bĂątir

Eliane VERGNOLLE, professeur honoraire d’histoire de l’art mĂ©diĂ©val – UniversitĂ© de Franche-ComtĂ©

La Bourgogne de l’an mil est caractĂ©risĂ©e par le dĂ©veloppement concurrent de deux styles architecturaux qui sont Ă©galement deux arts de bĂątir : d’une part des monuments construits en pierre de taille – Ă  l’instar du chevet de Saint-Philibert de Tournus –, de l’autre des monuments construits en petit appareil. Les premiers font une certaine place au dĂ©cor sculptĂ©, les seconds, comme Saint-Vorles de ChĂątillon-sur-Seine, privilĂ©gient un dĂ©cor externe d’arcatures aveugles. L’exemple de Saint-BĂ©nigne de Dijon qui apparaĂźt comme une synthĂšse entre les deux courants rĂ©vĂšle toute la complexitĂ© d’une crĂ©ation architecturale encore en devenir : tandis que dans d’autres rĂ©gions, notamment dans la Bourgogne occidentale et la vallĂ©e de la Loire, la pierre de taille tendait Ă  s’imposer au cours du premier tiers du XIe siĂšcle, on assistait Ă  un phĂ©nomĂšne inverse dans la vallĂ©e de la SaĂŽne, avec la gĂ©nĂ©ralisation des constructions en petit appareil et dĂ©cor d’arcatures aveugles liĂ©es Ă  un courant artistique prĂ©gnant dans les Alpes et le Jura – courant qualifiĂ© de « premier art roman Â» depuis les travaux de Puig i Cadafalch.

  • 18 h : Cocktail de clĂŽture – Rencontre avec les intervenants

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Logo FEDER 2019Inscrites au programme officiel de la commĂ©moration du millĂ©naire de la consĂ©cration de l’abbatiale Saint-Philibert, les Rencontres du MillĂ©naire sont soutenues financiĂšrement par la Ville de Tournus et le Fonds EuropĂ©en de DEveloppement RĂ©gional (FEDER).